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Clubatcost : vers une nouvelle rationalité des comportements d'achat ?

Alors que se termine la saison des soldes, il est intéressant de revenir sur l'innovation majeure de la fin de l'année 2009 en matière de distribution : le site Clubatcost.fr qui vend du prêt-à-porter avec une approche totalement inédite. Les vêtements sont proposés à prix coûtant, sans marge (avec le détail des différents postes de coût pour décomposer le prix pratiqué, en toute transparence) ; mais pour avoir accès à ce tarif le client doit payer une cotisation annuelle dont le montant varie de 30 à 180 €. le site, filiale du groupe Orchestra, se rémunère sur les cotisations et fait donc le pari d'un grand nombre d'adhérents.

De nombreux journalistes et blogueurs se sont déjà penchés sur ce concept, unanimement salué pour son caractère profondément innovant. Aucune info n'a filtré sur le bilan "business" des premiers mois d'activité, et notamment le nombre de clients inscrits. D'un point de vue marketing, que peut-on en dire ?

Les produits sont de bon goût, plutôt des basiques classiques avec une petite touche rock pour séduire les femmes actives, leurs hommes et leurs enfants. Les prix pratiqués sont évidemment bas mais pas imbattables dans l'absolu, c'est plutôt le rapport qualité-prix qui semble excellent - à confirmer bientôt à la réception du premier cachemire commandé ! -. Le fonctionnement "en club" est séduisant, il valorise le côté "maligne qui sait faire de vraies bonnes affaires" de la cliente. A noter que Clubatcost propose aussi, en plus de l'achat en ligne, des ventes en réunion à domicile (ce qui confirme l'intérêt de ce circuit dont j'ai déjà parlé avec Natura.) 

Finalement tout est plutôt bien pensé dans ce club... et pourtant il laisse une impression déroutante quand on explore les pages du site. En y réfléchissant bien, ce qui destabilise c'est l'absence de marques. La promesse de Clubatcost c'est de faire une économie de 70% par rapport au même article en boutique... mais le même article en boutique aurait une marque, un peu ou très connue (certainement assez connue au regard des "prix boutique" annoncés, qui sont élevés). Un vêtement acheté sur venteprivée est séduisant pas tant à cause de son prix dans l'absolu, que pour l'opportunité d'avoir un produit de marque à ce prix là. Le pari de Clubatcost c'est donc de rationaliser l'achat de vêtement à un point tel que le désir de marque ne joue plus du tout, le vêtement devenant juste un article évalué sur sa matière, sa façon et ses finitions. Intellectuellement cela s'impose comme une évidence... mais la grande inconnue de l'équation, c'est le coefficient de "résistance émotionnelle" qui s'exercera dans les comportements d'achat à cette rationalité si nouvelle.

Scotch Brite Fibres Naturelles : innovation dans le ménage vert

Scotch Brite  a lancé une éponge "écolo" : composée de fibres naturelles et d'origine végétale. Elle ressemble à une éponge normale mais elle est toute beige et la partie qui gratte ressemble à un tableau d'art contemporain : il y a plein de petits filaments dans une matière bizarre, enchevêtrés d'une manière très organique. Même l'emballage est au parfum, il est composé d'amidon de mais et crisse drôlement quand on le touche - il me semble qu'autrefois, dans les années 70, les choses qu'on achetait étaient emballéees dans ce type de plastique musical.

Moi je trouve cela très réussi, j'en ai d'ailleurs acheté tout un tas pour ma cuisine et ma salle de bain (en plus cela va beaucoup mieux dans la cuisine qu'une éponge avec une face rouge ou bleue !). Mais la question que je me pose : n'est ce pas un produit trop bobo pour être vraiment utile ? est-ce que les gens se soucient de l'environnement au point d'acheter des éponges végétales ?

Un début de réponse : j'ai lu dans LSA que le marché des vinaigres est en pleine explosion cette année (+20%). Un peu parce que les gens sortent moins  manger dehors (et donc cuisinent plus chez eux) ; beaucoup parce que les ventes de vinaigre blanc sont en plein boom : celui qui sert à faire son ménage sans polluer, en remplaçant toutes sortes de nettoyants ménagers sophistiqués. Ce serait donc que les comportements de consommation commencent vraiment à changer !

Le vinaigre blanc a certes un avantage par rapport à son amie l'éponge écolo, c'est qu'il est bien meilleur marché que les produits qu'il remplace. Cela facilite certainement son adoption rapide, même par les éco-consommateurs les plus timides.  Notre éponge Scotch Brite n'est pas bon marché, mais elle n'est pas plus chère qu'une autre éponge double face de grande marque (2,85 le lot de deux). La révolution verte a de beaux jours devant elle dans les pratiques ménagères !

Innovations : les 2 vaches et le petit suisse

Trouver des axes d'innovation originaux n'est pas très facile mais certaines marques ont parfois la chance de tomber sur des besoins de consommateurs non satisfaits tellement évidents qu'on se demande pourquoi tout le monde n'y a pas pensé avant.

Regardez ces petits suisses aux fruits que viennent de lancer les 2 Vaches :

Les femmes qui ont un bébé sont connues pour être très impliquées dans l'alimentation de leur petit. D'où un choix assez important de produits bio ou nutrionnellement très pointus pour les bébés, du genre petits pots ou laits infantiles.

Mais dès que la petite créature a grandi, fait pousser ses dents et devient capable de tenir une cuiller toute seule : plus rien. La voilà condamnée, pour combler ses importants besoins en calcium, à se gaver de crèmes desserts, gélifiés et autres petits suisses non seulement pas bio, mais en plus saturés d'additifs en tous genre.

Le problème c'est que les marques "historiques" du bio ont été développées pour une clientèle adulte, et même plutôt senior, débarrassée du problème de nourrir des enfants mais très concernée par son propre équilibre alimentaire ; le genre qui se régale d'un yaourt nature, au lait de brebis de préférence, parfumé de trois gouttes de miel de châtaignier. Certainement excellent mais pas très facile à faire avaler à un enfant normalement constitué !

Il y avait donc un énorme vide sur le marché de l'Ultra Frais laitier, au croisement de l'offre de produits bio et de la demande des familles avec enfants. Les 2 Vaches s'y sont installées et on ne voit pas très bien ce qui pourrait leur donner tort !

A la pointe de la mode... et de l'aiguille

Vu dans le métro parisien l'autre jour... deux filles jeunes et d'allure parfaitement fashionista, lourdement chargées chacune d'un gros carton aux couleurs de la marque Janome : elles venaient de s'acheter chacune une machine à coudre ! j'étais tellement éberluée que je n'ai pas dégainé mon photo-phone assez vite pour les shooter toutes les deux ensembles, mais j'ai réussi à a attraper une, comme en témoigne le chef d'oeuvre de photojournalisme joint à cette note. 

Il y a en effet de quoi s'étonner car le marché des machines à coudre fait partie des catégories du "Petit Electro-Ménager" des plus sinistrées depuis que un pantalon bien coupé s'achète pour moins de 30 € et que la couture ne fait plus partie des matières enseignées à l'école.

Entre temps deux infos sont venues me confirmer que mes couturières du Trocadero n'étaient en rien des excentriques ou des élèves d'Esmod, mais qu'il s'agit bien d'une tendance de fond :

A New York, après plusieurs années de passion pour le tricot, la nouvelle mode qui fait fureur est de se coudre soi-même ses vêtements. Cours et ateliers fleurissent, permettant de se looker à moindres frais et en toute originalité.

LSA  souligne dans un article du 15 octobre 2009 la tendance du "fait maison" qui se traduit par des ventes en forte progression sur tous les marché d'ingrédients (oeufs, farine, sucre, crème fraiche...) alors que les plats cuisinés tout prêts s'écroulent ; sans compter la ruée sur les robots ménagers, machines à pain et autres yaourtières (on en a déjà parlé).

Le regain d'intérêt pour la couture est une bonne nouvelle pour les fabricants de machines, mais aussi une opportunité pour tous les autres produits et services qui peuvent s'y rapporter : merceries, tissus, cours, modèles... Juste au moment où Bouchara, le dernier grand magasin de tissus parisien, vient d'être remplacé par un H&M !

Le divorcé ou le marketing de la frustration

Vu dans une boulangerie-pâtisserie de campagne : un divorcé, un drôle de gâteau mi-éclair, mi-religieuse, composé de 2 demi-éclairs : l'un au café, l'autre au chocolat; réunis ensembles et surmontés d'un peu de crème au beurre.

C'est très appétissant, et très bon, mais là n'est pas la question. J'ai trouvé que c'était un produit particulièrement intéressant car il est pile dans ce que Goerges Chetochine (voir la note sur son dernier livre ci-contre) appelle "gérer la frustration du consommateur". Dans la société d'hyperchoix qui est la nôtre, le problème du marketing n'est plus de répondre le mieux possible aux besoins et attentes du consommateur : ses envies, ses désirs, et même ses rêves les plus fous sont déjà largement comblés. Son souci, quand il achète un produit ou un service, c'est la frustration d'avoir dû renoncer à tous les autres produits ou services offerts, et l'incertitude de ne pas avoir fait le meilleur choix possible dans cette offre si abondante.

Ce que le marketing doit donc avoir à coeur, et que ce gâteau divorcé fait si bien, c'est de minimiser cette frustration et de conforter le consommateur dans son choix : et là, pas de regret d'avoir du trancher entre café ou chocolat, éclair ou religieuse... on a tout ensemble !

La dernière question c'est le pourquoi du nom "divorcé". Mon idée c'est que les gens en couple achètent souvent un éclair au café et un au chocolat pour pouvoir les partager et goûter aux deux parfums... ce qu'on ne peut plus faire quand on est tout seul. Mais d'autres interprétations sont les bienvenues !

Marketing et mouchoir en papier

Un poncif du marketing consiste à citer le marché des mouchoirs en papier comme l'exemple archétypique de la famille de produit où le consommateur est totalement désimpliqué, et laisse la porte ouverte aux produits "sans marques" (MDD, produits discount...) et peu coûteux.

Jusqu'à un certain point, c'est vrai : c'est un des marchés où la part des MDD est la plus élevée, autour de 60% en valeur d'après les panels.

Il semblerait pourtant que les grandes marques, Lotus et autres Kleenex, ne résistent pas trop mal ces dernières années, à grand renfort d'innovations : packaging décorés qui deviennent des accessoires de mode ou de déco, mouchoirs "enrichis" en lotions, gel anti virus etc. Ces innovations animent temporairement le rayon à défaut de s'implanter durablement dans les habitudes d'achat, car il est clair que le marché est réticent à la sophistication. Mais c'est déjà ça.

 Pour autant il y a un point sur lequel tout le monde semble d'accord, et le débat est clos : c'est la qualité relative des mouchoirs de marque par rapport aux produits sans marque. Pourtant essayez, et vous verrez, ou plutôt vous sentirez la différence : si certains mouchoirs MDD soutiennent bien la comparaison il y a en aussi beaucoup qui sont nettement moins confortables à utiliser, moins épais, moins doux... Et cette différence de qualité est vraiment sensible (surtout quand on est enrhumé !), nettement plus que sur un jus de fruits, une eau en bouteille ou une crème fraiche, par exemple. C'est basique comme argument mais n'est ce pas parfois utile et sain de revenir aux fondamentaux ? une marque est un gage de qualité, et c'est pour ce différentiel de qualité, bien réel, que le consommateur est prêt à payer un peu plus cher.

Lifestage marketing : Houra pour les futures mamans !

Si vous pensez aux grandes étapes de votre vie (départ de chez les parents, installation en couple, arrivée du premier enfant...) et que vous essayez de vous souvenir de ce qui s'est passé pour vous en terme de consommation à ce moment-là... c'est à chaque fois un grand chamboulement, on se met à avoir besoin de plein de choses nouvelles et à fréquenter des magasins inconnus avant. Les marketeurs ont bien compris que ces étapes sont des moments très opportuns pour toucher le consommateur : il est particulièrement réceptif à de nouvelles offres, surtout si elles lui facilitent la vie à un moment où généralement elle est un peu compliquée. Cela s'appelle le lifestage marketing.
Le cybermarché Houra.fr a imaginé un programme de lifestage marketing que je trouve particulièrement intéressant :
 9 mois de livraisons offertes aux femmes enceintes et aux jeunes mamans... c'est pertinent et élégant, et c'est surement une très bonne manière de convertir durablement aux courses en ligne des jeunes femmes qui vont dorénavant consacrer une grosse partie de leur budget à l'achat de couches, de lait, de biscuits et de compotes !

YAOURT

Si il y a bien une tendance de fond en ce moment, c’est le retour du yaourt fait maison : toutes les filles qui aiment un peu cuisiner et qui ont des petites bouches d’enfants à nourrir y pensent, les magazines pour foodista (Regal cet été) y consacrent des dossiers… Pensez donc, faire ses yaourts n’a que des avantages : c’est du fait-maison, c’est économique, pas très compliqué, cela permet de manger des laitages bio si on choisit le lait adéquat ; et pour nous les trentenaires c’est un geste et une saveur délicieusement nostalgiques de ces années 70 où nos mamans fabriquaient leurs yaourts dans des pots en plastique bleu vif ou orange. Je vous le dis tout de suite, j’ai cédé à cette mode du yaourt et voici le résultat sur la photo : appétissant non ?
En revanche il y en a quelques-uns qui n’ont pas capté le signal, ni faible ni fort, de cette tendance : ce sont les fabricants de yaourtières (Seb, Moulinex…) et les distributeurs. Offre réduite (1 ou 2 référence maximum par magasin), produits peu inspirant (notice minimaliste, design sans âme…)… Pourtant si la yaourtière suit le destin de la machine à pain il va y avoir des millions de foyers à équiper !